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L’altérité à l’heure de la post-colonialité

Plus que jamais, la culture est au centre d’un enjeu politique d’envergure au point de servir de puissant instrument d’assimilation, de décivilisation et de dénivellement. C’est ce dont témoigne la naissance à la fin du XIXe siècle d’un art africain fortement imprégné du courant évolutionniste ; un paradigme fondé sur l’analogie d’une évolution biologique et stratigraphique et une évolution culturelle. C’est dans cette perspective, qu’en dépit de l’intégration de l’art nègre dans les catégories de l’esthétique, l’ensemble de la production matérielle africaine est dorénavant utilisée pour jeter une passerelle entre l’art et l’ethnographie. On observe ainsi un intérêt croissant du monde occidental pour la sculpture africaine de nos jours.

Dans un tel contexte, l’Afrique est célébrée pour sa sculpture considérée dans le monde occidental comme une forme artistique extrêmement évoluée et sophistiquée avec des milliers d’années d’histoire derrière elle. Elle est même parfois considérée comme une subdivision de l’« art primitif », concept issu de l’évolution darwinienne. Il découle ainsi d’une théorie émanant de L. de Vinci selon laquelle, la peinture, en vogue en Occident, serait la forme d’art la plus élevée et la dernière à avoir émergée. Ce qui mène dès lors à la conclusion que les sociétés ne possédant que les sculptures sont attardées. En dépit de la découverte des peintures rupestres datant de l’âge de pierre qui vint annuler ou relativiser cette théorie, l’idée d’un « art primitif » africain arriéré ou originel a persisté, confortant ainsi l’idée de Hegel qui suggérait déjà l’exclusion de l’Afrique du monde historique.

Ainsi, l’expression « art primitif » héritée des anthropologues du XIXe siècle qui considéraient l’Europe de leur époque comme l’apogée de l’évolution sociale connaît encore de beaux jours même si elle se révèle dans son acception courante comme un concept négatif. Elle est alors définie comme appartenant aux régions ne faisant pas partie des traditions occidentales et orientales tournées vers la modernité. Il s’agit donc assurément d’une définition ethnocentrique. Il apparaît évident à travers cette forme d’approche que les études en art portant sur les régions jusque là peu connues de l’Occident n’avaient d’autres buts que la recherche de l’origine première de l’art en la sculpture. C’est ce qu’atteste du reste le recours à l’euphémisme d’« art premier ». Ce qui suppose que l’art extra-occidental soit antérieur à tout autre. Toute chose qui pose fort mal le problème de l’origine et d’une éventuelle perspective historique linéaire en laquelle viendrait sagement se ranger les cultures.



REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES.

- AMSELLE, J.L., Doit-on exposer l’art africain ?, Le musée cannibale, Gonseth, 2002.

- LEFEUVRE Daniel, Pour en finir avec la repentance coloniale,  Flammarion Collection : Champs Actuel, 2008

- COLIN, R., Le Primitivisme et l’art moderne, Paris : Thames and Hudson, coll. L’Univers de l’art, 1997.

- DELE, J., Western might, African voice. African art at the dawn of another millenium,1998.

- DUPAIGNE, B., Quels musées d’ethnographie pour demain ? Quel avenir pour les collections extra-européennes ?, Paris : Musée de l’Homme, 1993.

- GRAILLE, C., Primitifs d’hier, artistes de demain : l’art kanak et océanien en quête d’une nouvelle légitimité, 2003.

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