Au nombre des changements dans la recherche en anthropologie je souhaite souligner le développement important de certains champs au niveau international et qui ne sont pas ou à peine abordés en France du fait, d’une part, des réticences institutionnelles vis-à-vis de questionnements qui sortent des domaines et terrains traditionnels de l’anthropologie française et, d’autre part, des difficultés méthodologiques spécifiques que posent ces nouveaux thèmes (question d’échelles en particulier).
Je veux parler en particulier des recherches en anthropologie de l’environnement. J’ai déjà montré lors de mon intervention au séminaire des Assises consacré à l’Europe que ce domaine était fréquemment sollicité dans les Appels à Propositions de Recherche, mais qu’aucun anthropologue français ne pouvait y répondre, faute de postes statutaires dans ce domaine et de compétences, il faut bien l’admettre aussi. Je voulais mettre en évidence le décalage dramatique entre les possibilités professionnelles qu’offrirait ce champ si des enseignements universitaires et des postes de chercheurs étaient créés dans ce domaine.
Dans le prolongement de ce séminaire et en prévision des Assises j’apporte ci-dessous quelques points de repère quant à l’ampleur du développement du champ de l’anthropologie de l’environnement et des créations de postes qui l’accompagnent... ailleurs qu’en France.
De janvier 2007 à aujourd’hui, j’ai recueilli les offres de postes en anthropologie de l’environnement sur lesquels une information a circulé dans la liste de diffusion de l’EANTH (Anthropology and the environment – A section of the American Anthropological Association). Une grande partie des membres de cette liste sont des anthropologues (anthropologie sociale et culturelle) des États-Unis. Une grande majorité, sinon la totalité, des anthropologues de l’environnement aux USA sont affiliés à cette liste, ce qui lui donne une certaine légitimité représentative. C’est pour cette raison que j’ai centré mon repérage sur les offres de postes en anthropologie de l’environnement aux USA : s’il ne peut prétendre être exhaustif, il est en tous cas suffisamment large pour nous donner à réfléchir.
Les offres d’emplois permanents pour l’année aux USA faisant explicitement appel à des anthropologues spécialisés dans le domaine de l’environnement se répartissent comme suit :
– Universités, Instituts de recherche : 23
– ONG, institutions diverses : 2
Soit un total de 25 postes pour la seule anthropologie de l’environnement inexistante en France !
À ces 25 postes, on peut ajouter 3 postes de Visiting professor, lecturer ou chercheur d’une durée de 1 à 3 ans.
Ceci illustre clairement, je l’espère, l’intérêt qu’il y aurait pour l’anthropologie française à ne pas faire l’impasse sur des champs qui, du fait de l’intérêt qu’ils présentent pour la société contemporaine, pourraient motiver les institutions à créer des postes et, par conséquent, permettraient d’accroître la visibilité de la discipline en France et la présence de l’anthropologie française sur la scène européenne.